Archéologie

  • Encyclopédie de famille

Archéologie. Ce mot, dans la généralité de son acception et selon son étymologie, comprend l’étude de l’antiquité tout entière par les monuments et par les auteurs. L’usage l’a bornée à l’étude et à la description des monuments anciens.

Tous les monuments, même les plus communs et les plus grossiers, déposent de quelques faits, et l’ensemble de ces faits est comme une statistique morale des anciennes sociétés. Considérée de cette hauteur, l’archéologie mérite le nom de science : son utilité frappe dès l’abord ; la variété des moyens propres à son étude nous charme bien vite. Elle nous fait vivre et nous entretenir avec tous les grands hommes et tous les grands peuples des temps passés ; nous cherchons notre histoire dans la leur, et nous ne savons pas résister au plaisir de comparer nos croyances avec leurs opinions, nos goûts avec leurs usages, et nos espérances avec leurs destinées. Pour remplir sa mission, l’archéologie fouille dans la poussière des peuples primitifs ; ils ont tracé leur histoire sur leurs monuments ; les temples de leurs dieux témoignent de leurs croyances ; les ouvrages publics, de leurs besoins sociaux, des moyens qu’ils surent se créer pour y suffire ; leurs meubles et leurs ustensiles, des mœurs et des goûts individuels subordonnés aux mœurs générales et aux goûts nationaux ; leur luxe, de leurs richesses et de l’état de leur économie publique ; et les chefs-d’œuvre de leurs arts, comme les chefs-d’œuvre de leur littérature, de toute la puissance chez eux de l’étude et de l’imagination. Un attrait irrésistible nous entraîne donc vers ces temps obscurs pour l’histoire elle-même. Le monde, jadis habité par les nations ensevelies sous le sol qui porte les nations vivantes, est le domaine de l’archéologie. L’histoire écrite, les préceptes recueillis par la critique littéraire, l’étude des langues anciennes, sont les principaux moyens qui, avec la connaissance de l’art, guideront l’amateur et le savant dans la connaissance de l’antiquité. La géographie, la chronologie , l’histoire des religions et des mœurs anciennes devront la compléter.

L’archéologie embrasse les diverses parties de l’art, l’architecture, la sculpture , la peinture, la gravure, la glyptique, etc. Elle étudie avec soin les mosaïques, les vases, les instruments religieux, les armes de guerre, les ornements, les bijoux, les meubles, les costumes, les ustensiles domestiques, etc. La numismatique est la partie la plus considérable de l’archéologie ; vient ensuite l’iconographie ; puis les monuments écrits, les inscriptions sur marbre, pierre, papyrus, parchemin, etc.

Les anciens ne connurent pas l’archéologie, comme science : elle date seulement de la Renaissance. Dante et Pétrarque, en cherchant de vieux manuscrits, recueillirent aussi de vieilles inscriptions. Les médailles attirèrent encore l’attention du chantre de Laure. Des restes de peinture antique furent découverts à l’époque même ou l’on commençait à raisonner sur la théorie de cet art au seizième siècle. Raphaël et Michel-Ange étudièrent la sculpture antique, les pierres gravées, les grandes ruines de l’architecture grecque et romaine ; les érudits y cherchèrent l’explication des traditions ecrites sur l’antiquité, et la science proprement dite fut dès lors fondée. Laurent de Médicis établit à Florence un enseignement public d’archéologie ; l’histoire de l’art vint puiser à la même source que ses théories ; Winckelmann écrivit sous l’inspiration de ses chefs-d’œuvre, et l’alliance des arts et de l’archéologie fut scellée par le génie de ce grand homme. Louis XIV fonda l’Académie des Inscriptions et belles-lettres ; Rome expliqua les monuments de sa splendeur primitive ; des voyageurs courageux allèrent exhumer ceux de la Grèce , et le monde savant fut comme un laboratoire où l’on s’efforçait de ressusciter l’antiquité pièce à pièce. Grævius et Gronovius avaient recueilli dans leurs volumineuses collections les fruits épars de tous ces labeurs ; Gruter et Muratori formaient un corps systématique de toutes les inscriptions trouvées dans le monde romain ; Montfaucon expliquait par les monuments les mœurs et les usages des anciens ; dom Martin, la religion des Gaulois ; Baxter, les antiquités britanniques ; et Kircher s’était donné pour un Œdipe qui interprétait toutes les énigmes égyptiennes.

Le siècle dernier fut réellement celui qui fonda la véritable science de l’antiquité : la multiplicité des monuments, la fondation des musées, le goût des collections particulières, multiplièrent aussi les études. Le comte de Caylus soumit à l’ordre chronologique les monuments des différents âges, et pénétra le secret de la plupart des arts qui les avaient produits ; Eckhel coordonna méthodiquement la science des médailles ; Rasche la rédigea selon l’ordre alphabétique ; Passeri et Dempster ouvrirent à Lanzi la carrière des idiomes etdes monuments de l’Italie antérieurs à la fondation de Rome ; Herculanum et Pompéi étaient découverts ; l’abbé Barthélémy réédifiait la Grèce de Périclès de ses propres débris ; Zoega déblayait les avenues de l’antique Égypte, et Visconti paraissait au milieu de tant de travaux comme bien capable de les compléter tous.