Allégorie

  • Encyclopédie de famille

Allégorie. Ce mot indique la substitution du langage figuré à l’expression propre, d’un discours détourné au discours direct. Considérée comme une simple figire de rhétorique, ce n’est donc qu’une métaphore soutenue et continuée, d’un fort bel effet lorsque le sens en est parfaitement clair, et que les rapports, comme l’a dit La Harpe après Quintilien, ne sont ni trop multipliés ni pris de trop loin. On donne un sens plus étendu à l’allégorie, quand on appelle de ce nom une fiction poétique où des êtres moraux sont personnifiés. Dans l’un et dans l’autre cas, le voile de l’allégorie doit être artistement tissu, mais transparent, et, comme l’a fort bien dit Lemierre :

L’Allégorie habite un palais diaphane.

L’allégorie est aussi ancienne que le monde, et, comme le rappelle M. Tissot, « l’allé- gorie est la figure universelle par laquelle le genre humain tout entier entra dans l’ordre intellectuel et moral. » Le langage primitif de l’homme se trouva composé d’images, et dans l’enfance des sociétés l’allégorie, au lieu d’être un voile, comme chez les modernes, fut, au contraire, une clef et un flambeau destinés à montrer, à éclairer, à expliquer, à rendre sensible ce que le discourt ne pouvait encore in- terpréter d’une manière claire et précise ; ce fut, en un mot, une traduction des idées de l’homme parle secours des objets matériels de la nature. De là l’usage cons- taùt chez toutes les nations de représenter les abstractions pat les images des objets corporels ; de là les formes symboliques du langage chez les anciens peuples. Mais bientôt l’allégorie disparut du lan- gage habituel pour former une langue à part et devenir le partage de quelques pri- vilégiés ; elle tomba dans le domaine de la religion. Les allégories antiques parve- nues jusqu’à nous n’ont pas encore trouvé leurs égales. On en cite pourtant quelques-- unes qui manquent de clarté.

Les premiers Pères de l’Église, qui pour la plupart étaient platoniciens, empruntèrent de leur maître cet usage des formes allégoriques, dont ils ont quelquefois poussé le goût un peu trop loin. Les Écritures offrent elles-mêmes beaucoup d’allégories. De tous les peuples modernes, les Orientaux seuls ont parfaitement compris le génie de l’allégorie : leur littérature présente en ce genre des modèles qui pour la grâce, la vérité et l’imagination, n’ont presque rien à envier aux chefs-d’œuvre de la Grèce.