Angleterre

  • Encyclopédie de famille

Angleterre. Elle tire son nom des Angles, qui, joints aux Saxons, la conquirent au cinquième siècle. Cette contrée de l’Europe, qui fait partie des îles Britanniques, forme une division administrative et politique du royaume uni de la GrandeBretagne et d’Irlande, auquel on donne souvent son nom. Sa capitale, Londres, est aussi la capitale de tout l’empire Britannique. L’Angleterre est bornée au nord par l’Écosse, à l’est parla mer du Nord, au sud par la Manche, à l’ouest par l’océan Atlantique et la mer d’Irlande ou canal de Saint-Georges.

L’Angleterre était connue des Phéniciens sous le nom d’Albion. Ses plus anciens habitants paraissent avoir appartenu à cette race gaélique qui à une époque très reculée occupa toute l’Europe occidentale. Plus tard une invasion de Kymris vint se superposer à la race primitive et pure, apportant avec elle le régime des castes et le culte druidique. Ces deux peuples se confondirent, et l’île entière prit e nom de Bretagne, emprunté à la tribu kymrique. C’est sous le nom de Bretagne qu’elle est connue pendant la domination romaine. Au cinquième siècle les Angles et les Saxons vinrent au secours des Bretons attaqués par les Scotes et les Pietés. Renforcés successivement par de nouvelles bandes de leurs compatriotes, les AngloSaxons contraignirent les Bretons à leur céder le sol : ce ne fut toutefois qu’après que ceux-ci se furent longtemps et vaillamment défendus sous leur roi Arthur. Le petit nombre de Bretons qui restèrent dans l’île se réfugièrent en Cambrie (aujourd’hui le pays de Galles) ; la plus grande partie d’entre eux se retirèrent dans l’Armorique, contrée maritime de la Gaule, qui prit alors le nom de Bretagne.

Les Bretons avaient été convertis de bonne heure au christianisme ; dès le troisième siècle une hiérarchie régulière existait dans le pays, et des couvents s’y étaient élevés en grand nombre. Mais l’herésie du moine Pélage, au cinquième siècle, avait séparé les Bretons schismatiques de l’Église de Rome. Cette circonstance favorisa beaucoup la conquête des Anglo-Saxons ; car le légat du pape se mit à leur tête pour exterminer ces hérétiques. A dater de l’an 598 la religion chrétienne, préchée par le moine Augustin, avait pénétré parmi les Anglo-Saxons. Les Anglo-Saxons fondèrent sept petits États, dont les chefs prirent le titre de rois : une confédération unissait ces États entre eux, et des assemblées générales se tenaient pour traiter les affaires d’intérêt commun. Ces royaumes, qui formaient l’heptarchie, étaient ceux de Kent, Sussex, Westsex, Essex, Northumberland, Estanglie, Mercie avec la Westanglie. Egbert le Grand, roi de Westsex, réunit, en 827, sous son sceptre, tous ces petits États, sous le nom d’Angleterre. Ses successeurs furent contraints à payer un tribut annuel considérable aux Normands, ou, comme on les appelait alors, aux Danois, qui, eux aussi, à leur tour, avaient touché, dans leurs courses maritimes, les côtes d’Angleterre, et s’étaient emparés d’une partie du pays. Alfred le Grand réveilla le courage de sa nation, attaqua les Danois, les expulsa de l’île, leur fit même, par la suite, la guerre sur mer, et se maintint dans la possession de son royaume. Sa mort, arrivée en 902, fut une grande perte pour l’Angleterre, qui se trouva livrée à ses ennemis, contre lesquels des rois aussi faibles qu’Édouard l’Ancien, Adelstan, Edmond, Édred, et Édouard le Martyr ne pouvaient point la défendre ; aussi l’Angleterre, attaquée de nouveau par les Danois, fut conquise par le roi Suénon (Swen), venu pour venger ses compatriotes établis dans le pays qui avaient été massacrés par l’ordre d’Éthelred II, en 1002. Pendant quarante ans les Danois se maintinrent dans la possession de l’Angleterre, sous leur roi Canut le Grand et ses fils ; mais en 1041 ils durent y renoncer, le prince anglo-saxon Édouard le Confesseur étant devenu maître du trône, grâce à la valeur de Godwin. Ce fut Édouard qui, rassemblant certaines lois des Saxons et des Danois, en fit une sorte de code, qu’on appela le droit commun. Ce prince étant mort, en 1066, sans laisser de postérité, la race des rois anglo-saxons s éteignit, et la nation appela au trône Harald, comte de Westsex, qui était le seigneur le plus puissant de l’Angleterre. Mais Guillaume, duc de Normandie, qui n’avait, par une parenté très éloignée, que des droits fort incertains à la couronne, débarqua en Angleterre, à la tète de 60,000 hommes, et se rendit maître du royaume, le 14 octobre 1066, par la victoire de Hastings, où Harald succomba.

Guillaume distribua toutes les charges importantes de l’État à ses. compatriotes. Différentes révoltes, qui eurent lieu de la part des Anglais mécontents, lui servirent de prétexte pour exercer sa domination avec la plus grande rigueur. Il introduisit en Angleterre le système féodal, qui y avait été inconnu jusqu’alors, et surchargea les habitants d’impôts. En qualité de duc de Normandie, Guillaume était vassal du roi de France ; mais par sa conquête il l’égalait en puissance : aussi le suzerain ne tarda-t-il pas à devenir jaloux de son vassal, et bientôt éclatèrent ces guerres entre la France et l’Angleterre qui durèrent plus de quatre cents ans. En 1086 fut rédigé le Doomesday-Book (Livre du jugement dernier), acte définitif de la dépossession des Saxons, qui régularisa l’impôt et la propriété. Guillaume mourut en 1087, après avoir habilement gouverné l’Angleterre.

Ses successeurs furent d’abord spn second fils, Guillaume II, qui gouverna avec le même despotisme, puis son troisième fils, Henri Ier. Celui-ci, qui, avant son avènement au trône d’Angleterre, avait contraint par la force son frère aîné, Robert, à lui céder la souveraineté de la Normandie, rendit aux Anglais quelquesunes de leurs libertés, quoique du reste’ il sacrifiât tout à sa cupidité et à son ambition. N’ayant point de postérité mâle, il fit reconnaître par la nation, comme héritière de la couronne, sa fille Mathilde, mariée à Godefroi, comte d’Anjou. Cet événement occasionna, par la suite, des perturbations fréquentes, et on vit, à de courts intervalles, plusieurs dynasties se succéder dans la possession du trône. Cependant, malgré cette disposition, à la mort de Henri Ier, en 1135, ce fut le fils de sa sœur Adèle, Étienne, comte de Blois, que la nation proclama roi d’Angleterre. Étienne eut pour successeur, en 1154, le fils de Mathilde, Henri II, comte d’Anjou, nommé Plantagenet.

Cet Henri fut un des plus puissants rois de son temps : outre la Normandie, son héritage du côté de sa mère, il avait aussi, du côté de son père, l’Anjou, le Maine et la Touraine ; puis, par son mariage avec Éléonore de Guienne, femme répudiée de Louis VII, roi de France, il avait acquis encore la Guienne, le Poitou et d’autres provinces ; il possédait ainsi plus du quart de la France. Un pareil état de choses augmenta la jalousie qui existait déjà entre les deux couronnes de France et d’Angleterre, et donna lieu à de fréquentes guerres. Henri II ne mourut qu’en 1189. Le glorieux règne de ce prince fut signalé par sa lutte avec Thomas Becket, la conquête de l’Irlande et la révolte de ses fils.

Son fils et successeur, Richard Cœur de Lion, ainsi surnommé à cause du courage qu’il montra dans les croisades, fut l’idole de la nation : aussi lors de sa captivité en Autriche on fondit jusqu’aux vases d’églises pour payer sa rançon. Durant l’absence de Richard de grands troubles avaient éclaté en Angleterre, et il était survenu une guerre malheureuse avec la France ; son frère Jean lui succéda, au détriment d’Arthur, en 1199. C’était un prince faible ; dans une lutte contre la France, il perdit la Normandie et d’autres provinces ; par suite de discussions qu’il eut avec la cour de Rome, il fut obligé de se soumettre à de grandes humiliations. Ses sujets le contraignirent, en 1215, à leur octroyer la grande charte (magna charta), base fondamentale des franchises des trois ordres de la nation et de la liberté des citoyens. Cette charte fut plus tard confirmée et étendue par plusieurs rois. De nouveaux démêlés étant survenus entre le roi et les grands de son royaume, ceuxci dépossédèrent Jean de sa couronne, et le forcèrent de s’enfuir en Écosse, où il mourut en 1216. Son fils, Henri III, eut un règne long, mais plein de troubles, que ses fautes suscitèrent. C’est sous Jeansans-Terre que fut instituée la chambre basse du parlement ou chambre des communes.

Édouard Ier, fils de Henri III, succéda à son père. C’est du règne de ce prince que date la soumission du pays de Galles (1282). Il eut à soutenir une guerre contre Philippe le Bel, et mourut en 1307, dans une expédition contre l’Écosse. Le faible Édouard II lui succéda, et fut déposé en 1327, par acte du parlement. Il eut pour successeur Édouard III, qui fut l’un des rois les plus puissants de l’Angleterre. Il secoua le joug temporel du pape, et conquit une grande partie de la France ; après quoi il prit le titre de roi de France. Édouard poursuivit le cours de ses victoires jusqu’à sa mort ; mais le fruit en fut presque aussitôt perdu sous le règne de son successeur Richard II. Ce prince était fils, du fameux Édouard, dit le Prince Noir, qui gagna la bataille de Poitiers. Pendant sa minorité éclata la révolte de Watt-Tyler. Richard, qui maintes fois avait attaqué les droits de la nation, perdit la couronne et mourut en prison, en 1399. Des tentatives de réforme eurent lieu sous son règne, et Wiclef produisit sa doctrine, qui devait, par une filiation naturelle, donner naissance à celle de Jean Huss et à celle de Luther.

Henri IV, petit-fils d’Édouard H, étant monté sur le trône, on vit commencer la querelle sanglante qui dura un siècle, entre les familles de Lancaster et d’York, toutes deux issues d’Édouard II, et qui se disputèrent la succession à la couronne. Cette longue querelle est connue sous le nom de guerre de la Rose rouge et de la Rose blanche, parce que la famille de Lancaster portait dans ses armes une rose rouge et celle d’York une rose blanche. Ces luttes sanglantes paralysèrent les efforts des armées anglaises, qui, victorieuses à Azincourt sous Henri V, et maîtresses de Paris, avaient déjà conquis la moitié de la France. La minorité de Henri VI favorisa, pendant un certain temps, les prétentions de la famille d’York, que l’on vit monter sur le trône d’Angleterre et en redescendre à plusieurs reprises.

Depuis la bataille de Saint-Alban, en 1455, où se rencontrèrent pour la première fois les armées d’York et de Lancaster, jusqu’à la bataille de Tewkesbury, où les Lancastriens furent complètement détruits, ce furent entre les deux partis d’innombrables combats. Le duc d’York y perdit la vie. L’ambitieuse Marguerite d’Anjou, femme de l’imbécile Henri VI, se signala par son héroïsme et sa constance dans les revers. Le fils du duc d’York fut couronné sous le nom d’Édouard IV. Ce prince, après avoir pacifié l’Angleterre, mourut en 1483, laissant le trône à son fils mineur Édouard, sous la tutelle de son oncle le duc de Glocester. Celui-ci ne recula pas devant le meurtre de deux innocentes victimes pour régner à leur place. Richard III ne jouit pas longtemps des fruits de son forfait ; il mourut au bout de deux ans (1485).

Henri VII, comte de Richmond, de la famille de Lancaster, s’étant emparé de la couronne en 1485, s’en assura la possession en conciliant, par son mariage avec Élisabeth, de la famille d’York, les intérêts des deux maisons. Après avoir apaisé plusieurs révoltes suscitées par quelques chefs de l’ancien parti de la Rose blanche, mécontents du nouvel ordre de choses, il fit jouir l’Angleterre d’une constante tranquillité : aussi, en reconnaissance des bienfaits de son règne, on le surnomma le Salomon anglais. Avec lui commence la race des monarques anglais de la maison de Tudor (nom porté par le grand-père de Henri), qui finit, en 1603, avec Élisabeth. Son fils, Henri VIII, roi cruel et voluptueux, entreprit au dehors des choses importantes, mais presque toujours sans succès. Lors de la lutte qui s’éleva entre Charles-Quint et François Ier, il aurait pu exercer une grande influence sur les destinées de ces deux monarques, en qualité de médiateur, s’il eût été doué d’on caractère moins versatile, et s’il eût moins écouté les conseils de son premier ministre, le cardinal Wolsey, qui n’était guidé que par son intérêt personnel, et passait d’un parti à l’autre, au gré de son ambition et de sa cupidité.

La réforme opérée dans les Églises d’Allemagne fit une grande sensation en Angleterre : malgré les défenses les plus expresses, les écrits de Luther y furent lus avec avidité. Henri VIII, dont l’esprit était cultivé et qui possédait des connaissances en théologie, entreprit la défense de l’Église romaine, sur les sept sacrements, dans un ouvragé que Luther réfuta avec véhémence. Le pape Léon X, voulant témoigner à Henri VIII, toute la satisfaction que lui avait causée cet ouvrage, lui conféra le titre de défenseur de la foi, titre que de nos jours encore les rois d’Angleterre, quoique protestants, tiennent à honneur de porter. L’autorité exercée jusqu’alors en Angleterre par le pape avait été très grande, et la valeur des sommes d’argent envoyées en offrande de ce pays à Rome tous les ans avait été trèsconsidérable ; mais cela changea lorsqu’en 1534 Henri rompit son alliance avec le saint-siège, parce que le pape, qui craignait le ressentiment de l’empereur, n’avait point voulu sanctionner le divorce de Henri VIII et de Catherine d’Aragon, parente de Charles-Quint. Henri VIII refusa toute obéissance au pape, supprima successivement, en Angleterre, un grand nombre de couvents et d’abbayes, et se déclara chef suprême de l’Église dans son royaume, tout en laissant intacts les principaux dogmes de l’Église romaine. La réforme trouva un grand nombre de partisans, et la diversité des croyances ainsi que la confiscation des biens ecclésiastiques donnèrent lieu à une infinité de troublés. Henri essaya, comme son père l’avait déjà fait, d’augmenter la puissance royale. Il créa la première flotte, après avoir fait construire le premier vaisseau de ligne anglais ; mais pour équiper cette flotte il dut prendre à sa solde des marins des villes anséatiques, des Génois et des Vénitiens, qui avaient alors le plus d’expérience dans l’art de la navigation. Il établit l’office de l’amirauté, et assigna des traitements fixes aux officiers et aux soldats de marine.

À sa mort, arrivée en 1547, on vit successivement régner ses trois enfants. Édouard VI, d’un caractère doux, se montra grand ami de la Réforme, et fonda l’Église anglicane. Il mourut en excluant ses deux sœurs du trône et en y appelant sa parente lady Jane Grey. Cependant Marie réclama ses droits, fut proclamée reine, et Jane Grey eut la tête tranchée (1553). Marie montra des dispositions religieuses toutes différentes de celles d’Édouard, et, dans le but d’avoir un appui solide à l’étranger, elle épousa Philippe II, roi d’Espagne. Ce mariage, qui n’eut pour aucune des deux parties contractantes les avantages qu’elles en avaient espérés, excita en Angleterre un mécontentement général, et occasionna une guerre avec la France, dans laquelle l’Angleterre perdit, en 1558, Calais, le seul reste de ses anciennes possessions sur le continent. Marie mourut la même année, détestée de son peuple à cause des fréquentes exécutions qu’elle avait ordonnées dans le but d’arrêter les progrès de la Réforme.

Élisabeth, fille d’Anne de Boulen, sortant de la prison où plus d’une fois ses jours avaient été en danger, lui succéda. Depuis longtemps déjà toutes les espérances de la nation s’étaient portées vers elle, et elle sut les réaliser. Par l’impulsion qu’elle donna au commerce et par l’habileté avec laquelle elle profita des circonstances, elle éleva l’État à une grandeur jusqu’alors inconnue, et posa les bases de la prépondérance future de l’Angleterre. Elle apaisa les différents partis, et consolida la Réforme par l’organisation de l’Église anglicane ou épiscopale telle qu’elle existe encore aujourd’hui. Elle donna de grands encouragements à l’industrie, protégea les manufactures de laine, et accueillit avec faveur les étrangers que l’intolérance religieuse forçait dé quitter le continent ; Afin de s’instruire par elle-même des besoins de la nation, elle fit de fréquents voyages dans l’intérieur du royaume. En fournissant des secours aux protestants de France et aux Provinces-Unies contré l’Espagne, elle acquit une grande influence à l’étranger. Sa position vis-à-vis de l’Espagne la mit dans la nécessité d’entretenir une marine plus considérable que celle dé ses prédécesseurs, et en 1603 la flotte d’Angleterre se composait déjà de quatante-deux vaisseaux, montés par huit mille cinq cents marins. Les marins anglais les plus célèbres de cette époque furent Drake, le premier navigateur, après Magellan, qui fit un voyage autour du monde, et Walter Raleigh, qui fonda la première colonie anglaise dans l’Amérique septentrionale, Philippe II, roi d’Espagne, qu’Élisabeth avait irrité de plus d’une manière, arma inutilement contre elle, en 1588, la grande flotte à laquelle le pape avait donué le nom d’invincible Armada, Plus de la moitié de cette flotte fut anéantie par des tempêtes, sans qu’elle eût à soutenir un combat naval en règle. Élisabeth souilla son règne par l’exécution de Marie Stuart, reine d’Écosse. Le supplice du comte d’Essex en assombrit la fin.

À sa mort, en 1603, s’éteignit la race des souverains de la maison de Tudor. Quelque temps auparavant, elle avait désigné pour lui succéder au trône Jacques, roi d’Écosse. C’était l’unique rejeton de la maison des Stuarts, le fils de Marie Stuart et le plus proche parent d’Élisabeth. Son aïeule, Marguerite, était fille de Henri VII, roi d’Angleterre et grand-père d’Élisabeth. Alors on vit s’opérer d une manière paisible ce grand événement que de longues guerres sanglantes n’avaient pu effectuer : la réunion de l’Écosse et de l’Angleterre sous le même sceptre. Ici finit l’histoire de l’Angleterre proprement dite et commence celle de la Grande-Bretagne.