Catéchisme

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  • Encyclopédie moderne

Catéchisme. Κανηχισμδς Instruction verbale élémentaire quelconque : plus spécialement, une instruction verbale et élémentaire sur la religion ; et plus spécialement encore, un livre destiné à servir ou pouvant servir de formulaire pour cette instruction.

Sur le modèle du catéchisme latin, fort méthodique, rédigé par ordre du concile de Trente, sont faits nos catéchismes. Les meilleurs qu’on ait en langue française, pour les catholiques, sont : celui de Montpellier ; celui du diocèse de Meaux, par Bossuet ; la célèbre Exposition de la doctrine de l’Église catholique, par ce même prélat, sur les points qui la divisent d’avec les protestants. Le livre intitulé : De la Religion révélée, par M. Herbuisson, chapelain à l’école royale militaire de Paris, in-8°, 1813, chez Pillet, passe pour notre meilleur catéchisme sur les preuves de la religion chrétienne et catholique.

Il appartient aux évêques de composer ou de choisir, s’ils le veulent, le catéchisme à l’usage des écoles catholiques de leurs diocèses. Quand il est arrivé à quelques-uns d’y insérer des opinions qui n’appartiennent point à la foi, ou des préceptes contraires aux lois de l’État, ces désordres ont trouvé une répression plus ou moins efficace. Avant 1814, on avait fait faire, dans les bureaux du ministère des cultes, et approuver tellement quellement par un nonce du pape, pour tout le royaume, un catéchisme dont le chapitre dixième énonçait largement ce que Napoléon prétendait lui être dû à lui et à sa famille. Ce chapitre singulier a toujours paru un scandale, et n’a obtenu qu’un enseignement partiel et passager. Depuis 1814, il a été imprimé, dans trente diocèses français, des catéchismes contenant des préceptes illégaux ou même anticonstitutionnels ; mais, lorsqu’on s’en est plaint publiquement, il a été répondu officieusement que c’étaient des fautes d’impression. Cette excuse a suffi, parce qu’on manque, en France, d’une bonne loi et d’un tribunal constitutionnel sur la police des cultes.

Ceux qui pensent que les opinions religieuses doivent être libres, et que de la diversité des opinions en cette matière résulte surtout la liberté, désireront sans doute que chaque pasteur approprie renseignement de la foi aux habitudes, aux croyances et jusqu’à un certain point aux préjugés des populations. Mais comment ceux qui ne voient de salut que dans l’unité religieuse, et qui n’attribuent de supériorité à l’Église romaine que parce qu’elle a un chef permanent et infaillible, dont l’autorité s’élève au-dessus des évêques et rivalise celle des conciles généraux, dont les décrets n’ont de valeur que par son concours et son approbation, peuvent-ils approuver la variété qui existe dans les bases de l’enseignement catholique, dans le catéchisme ?

Mais, dit-on, les évêques, auxquels le droit appartient, comme successeurs des apôtres, d’enseigner la parole divine, seraient exclus de l’Église, s’ils s’éloignaient de sa doctrine.

Pourquoi les exposer à ce danger ? Tertullien, Origène, Arius, et la plupart des chefs de secte étaient des hommes pieux et savants ; ils se sont séparés de l’Église, peut-être par suite d’une erreur commise d’abord de bonne foi, et dans laquelle ils ont cru devoir persévérer.

Aussi le concile de Trente avait-il jugé nécessaire, pour éviter ce danger, de rédiger un catéchisme universel. Et c’est quand le souverain pontife est d’accord avec un concile général reçu par toute l’Église catholique, que les évêques s’arrogent le droit de publier chacun son catéchisme ? N’est-ce pas méconnaître hautement celte double et sainte autorité ? Ce n’est pas parce que l’unité du catéchisme a été imposée à l’empire français par l’art. 39 de la loi organique du concordat, et par le décret du 4 avril 1806, que les évêques se sont refusés à le recevoir ; c’est en vertu d’une prépotence qu’ils s’attribuent, malgré les dangers qui peuvent en résulter, et qui, selon le concile de Trente, juge compétent, en étaient résultés dans le monde catholique ; peut-être aussi est-ce pour s’attribuer un certain lucre, que les évêques persistent à publier des catéchismes différents.

Dans un rapport à l’empereur, du 11 mars 1806, resté inédit, et que le zèle filial vient de publier, l’illustre Portalis exposait à l’auteur de la loi organique, que le catéchisme de l’empire français était emprunté à celui de l’immortel Bossuet, le dernier Père de l’Église, et la lumière de l’Église gallicane.

Le cardinal Caprara, légat à latere, investi des pouvoirs extraordinaires du pape Pie VII, a approuvé ce catéchisme, parce que la foi est une, ce qui devrait suffire aux ultramontains ; et beaucoup d’évêques d’alors l’ont approuvé. Dans l’exposé des motifs du décret, aujourd’hui publié, Portalis rappelle les plaintes du concile de Trente sur la diversité innombrable des catéchismes et sur les encouragements qui en résultaient pour les hérésies. En ordonnant un catéchisme unique, les Pères du concile ne se proposaient pas seulement l’instruction des simples fidèles, mais même celle des évêques et des prêtres, par qui les fidèles sont instruits. L’unité de l’enseignement n’importe pas moins à l’État qu’à la religion.

« Ceux qui pensent qu’on ne devrait pas parler de religion et de morale aux enfants, et qu’on devrait attendre un âge plus avancé, méconnaissent la vivacité des premières impressions et la force des premières habitudes ;… elles de viennent en quelque sorte une seconde nature. »

Voilà les considérations puissantes qu’on a méconnues en 1814. La plupart des catéchismes publiés alors rétablissaient des locutions féodales, et rappelaient l’obligation de payer la dîme, abolie par les lois de la révolution. M. Lanjuinais et ses doctes amis s’élevèrent avec beaucoup de vivacité contre cet abus, que le gouvernement n’osa réprimer, dans la crainte de toucher à l’encensoir. Un recours comme d’abus au conseil d’État aurait été sans résultat, attendu qu’il n’y a pas de sanction pénale ; une poursuite correctionnelle pour délit de la presse renfermé dans un catéchisme, aurait amené beaucoup d’évêques devant les tribunaux ; on n’osa pas. Il en est résulté que la loi organique du concordat, à laquelle, ainsi qu’aux autres lois du royaume, les évêques prêtent serment d’obéissance lors de leur nomination, est impuissante devant leur résistance. On n’ose plus aujourd’hui en parler.

On devait, à la même époque, réformer la liturgie, et l’uniformiser, ainsi que la loi l’ordonnait. Portalis en avait pris l’engagement en 1806. Il n’a pas tenu sa parole. Aujourd’hui les évêques abandonnent successivement la liturgie française, pour prendre la liturgie romaine.

Il y a plus : aujourd’hui les évêques revendiquent la propriété des livres d’Église, et quoique la cour de cassation ait refusé de leur reconnaître ce droit, ils sont arrivés au même résultat par le droit de censure qu’on leur reconnaît, et par les condamnations prononcées contre les imprimeurs qui mettent au jour des livres semblables, sans en avoir préalablement obtenu la permission (décret du 7 germinal an XII ; arrêt du 9 mai 1843). La charte de 1830, qui a aboli toute censure préalable, n’a pas abrogé ce décret.