Aluminium

  • Encyclopédie de famille

Aluminium, corps simple, léger comme le verre, blanc et éclatant comme l’argent, inaltérable presque à l’égal de l’or, malléable et ductile au même degré que ces métaux précieux, tenace comme le fer et fusible comme le cuivre, que le moulage, le laminoir, la filière, le marteau et la lime peuvent façonner. Il a été extrait pour la première fois de l’alumine, vers 1830, par M. Wœhler, chimiste allemand, professeur à Gœttingue, qui transformait d’abord de l’alumine en chlorure d’aluminium et décomposait ensuite ce chlorure par le potassium ; mais il n’avait été isolé qu’en très petites quantités et à un état d’impureté tel que de graves erreurs sont longtemps restées accréditées sur son compte. Humphry Davy avait vainement essayé de l’extraire de l’alumiue au moyen de la pile. Cependant il paraît qu’on en avait tiré de la cryolite par ce moyen en Angleterre. Les expériences de M. Rose ont démontré la possibilité de l’extraire de ce minéral à l’aide du sodium, « Pour opérer la réduction, dit M. Sainte-Claire Deville, il suffit de mettre dans un creuset de porcelaine des couches alternatives de sodium et de cryolite pulvérisée et mélangée avec un peu de sel marin. On introduit le creuset de porcelaine dans un creuset de terre, et l’on chauffe au rouge vif jusqu’à fusion complète. On brasse la matière avec un agitateur en terre cuite, et on laisse refroidir. Tout l’aluminium est rassemblé en un seul culot qu’on trouve au fond de la masse refroidie… C’est là le procédé que j’ai employé et qui diffère peu de celui de M. H. Rose. Si l’on opère dans un vase de porcelaine, l’aluminium contient du silicium ; il contient du fer si l’on opère dans un creuset de fer… Cette expérience m’en a suggéré d’autres : j’avais souvent et depuis longtemps essayé de réduire par le sodium le chlorure double d’aluminium et de sodium ; quoique la réaction s’effectue complètement, je n’obtenais pas de culot métallique ; mais il a suffi d’ajouter au mélange un peu de fluorure de calcium pour que tout l’aluminium se réunit en culots au fond du creuset. » MM. Debray et Paul Morin ont obtenu de cette manière de l’aluminium assez pur. Les fluorures alcalins dissolvant l’alumine doivent donc être considérés comme le meilleur fondant de l’aluminium. On obtient encore l’aluminium en mélangeant de l’alumine et du fluorure de sodium qu’on arrose avec de l’acide fluorhydrique concentré ; la masse s’échauffe, on la sèche, on la fond, et on peut en extraire de l’aluminium comme on le fait de la cryolite. Ainsi l’aluminium s’extrait de l’argile au moyen des acides, qui en font d’abord de l’alun ; celui-ci, calciné, est transformé en un chlorure d’aluminium et de sodium ; enfin ce chlorure, traité par le sodium, donne l’aluminium. Les travaux de M. Sainte-Claire Deville sur l’aluminium datent de 1853 ; ils lui ont valu la croix d’honneur en 1855. La fabrication manufacturière de ce métal est aujourd’hui assurée, grâce au crédit mis par l’empereur Napoléon III à la disposition de l’inventeur pour fonder cette industrie : une usine a été élevée à cet effet à Nanterre ; une autre fabrique d’aluminium a été construite à Rouen. M. Bell, maire de Newcastle (Angleterre) le tire, dans sa fabrique, dubauxtile (composé d’alumine et de peroxyde de fer).

Inaltérable par l’air, par l’eau et par la vapeur d’eau, même à une température rouge sombre, l’aluminium est encore inattaquable par l’hydrogène sulfuré, l’acide nitrique, l’acide sulfurique à froid. Il s’altère cependant au contact de l’eau contenant des chlorures en dissolution, et l’action du sel marin, du vinaigre et des matières calcaires sur lui peut laisser des doutes sur son application possible aux usages culinaires. Les produits de cette altération sont inoffensifs.

L’aluminium donne avec le cuivre des alliages légers, très durs et d’un beau blanc, lorsque le cuivre est en petite proortion, et des bronzes d’un beau jaune d’or, malléables, d’une très grande résistance et beaucoup moins altérables que le bronze ordinaire, lorsque la proportion d’aluminium varie de 5 à 10 pour 100. On forme également avec l’aluminium des alliages d’étain, de zinc, d’argent, de fer et de platine. Il donne avec le fer un acier comparable à celui de Damas. On peut facilement faire sur le cuivre un plaqué d’aluminium très solide. La bijouterie fine s’est emparée de l’aluminium ; il est aussi facile à mouler, à estamper qu’à ciseler. On en fait des lames de couteau qui remplacent celles d’argent, des instruments de chirurgie, comme sondes ; spatules, etc. Il est extrêmement sonore, et on espère l’appliquer aux cordes d’instruments, aux timbres d’appartement, aux sonneries, etc. Comme il s’use moins que le bronze, on l’emploie aussi pour coussinets, glissoires et surfaces de frottement. On a même l’espoir d’en fabriquer des machines légères que les aérostats pourront facilement enlever. On peut en faire des câbles télégraphiques moins lourds. Malheureusement son prix est trop élevé. Après avoir valu 900,000 francs le kilogramme, il valait encore 100 francs en 1864.

En 1862, M. Hancok exposa à Londres des groupes d’oiseaux en aluminium qui laissaient à désirer à cause de leur couleur grise. En France on fabrique les aigles des drapeaux en aluminium. M. Christofle avait exposé à Londres un casque en bronze d’aluminium d’une faible épaisseur capable de résister, dit-on, au sabre et à la balle.

Le général de Béville, en rapprochant des textes latins, a découvert qu’un ouvrier romain était parvenu à extraire d’un verre alumineux une matière métallique dont il fit une coupe qu’il présenta à Tibère. L’empereur l’admira. L’ouvrier jeta sa coupe par terre ; elle ne fut que bossuée et à l’aide d’un petit marteau il l’a répara aussi facilement que si elle eût été d’or ou d’argent. Ce métal ne pouvait être que l’aluminium. D’après les historiens, on demanda à l’ouvrier si son secret était connu par d’autres que lui ; il répondit qu’il ne l’était que de lui et de Jupiter. L’empereur, craignant que l’or et l’argent ne fussent dépréciés par une matière aussi, commune que l’argile, fit détruire les ateliers de l’ouvrier et couper la tête de l’inventeur.