Alfred le Grand

  • Encyclopédie de famille

Alfred le Grand, sixième roi d’Angleterre de la dynastie saxonne, né en 849, à Wantage, dans le Berkshire, était le plus jeune des cinq fils d’Éthelwolf. Son père, qui avait pour lui une prédilection particulière, l’envoya tout enfant à Rome, et le fit couronner par le pape. Quelque temps après, il l’emmena à la cour de France, où il allait épouser Judith, fille de Charles le Chauve. Mais ils furent bientôt rappelés tous deux par une révolte qui venait d’éclater en Angleterre dans le sein même de la famille royale. Éthelbald, le fils aîné d’Éthelwolf, était à la tête des rebelles ; une réconciliation entre le père et le fils épargna au pays une guerre civile, et la mort ne tarda pas à les faire disparaître l’un et l’autre. Alfred succéda en 871 à son frère Éthelred, qui lui avait confié le commandement des troupes et les rênes de l’administration, et dont la mort le laissa, à vingt-trois ans, maître d’un royaume presque entièrement envahi par les Danois.

Les premières tentatives d’Alfred pour combattre les oppresseurs de son pays ne furent pas heureuses. Accablé par le nombre, abandonné des siens dans leur découragement, réduit à prendre la fuite, il résolut d’attendre dans la plus profonde obscurité le moment favorable de délivrer sa patrie ; il se mit au service d’un pâtre. Un an s’était à peine écoulé que les Anglais songèrent à reprendre les armes et à profiter des divisions de leurs ennemis. Instruit de ce qui se passait, Alfred conçoit et exécute le hardi projet de pénétrer dans le camp danois. Sous le costume d’un barde, une harpe à la main, il se mêle parmi les soldats, s’introduit auprès des chefs, gagne leur confiance par l’affabilité de ses manières, assiste à leurs repas et à leurs conseils, et, après avoir pénétré leurs projets et leurs moyens, il revient à la tête d’une poignée de braves porter le carnage et la mort dans le camp de ses ennemis. Ce premier succès fut pour l’Angleterre le signal de la liberté ; les Danois furent repoussés de toutes parts, et Alfred acheva de renverser leur domination par sa générosité. Tous ceux qui voulurent se soumettre et embrasser le christianisme eurent la permission de rester en Angleterre ; les autres purent regagner librement leur pays sous la conduite d’un chef qu’il leur désigna ; enfin, ceux qui entreprirent de lui résister, battus devant Rochester et chassés de Londres, cherchèrent vainement un refuge sur leurs vaisseaux, où la flotte anglaise, qu’il avait créée, acheva de les anéantir. Tranquille au dedans, sans crainte du dehors, Alfred ne s’occupa plus que de la civilisation et du bonheur de ses sujets. il voulut faire de l’Angleterre un seul royaume, régi par une administration et des lois uniformes ; L’union des tribus saxonnes, qui sous Egbert n’avait été que nominale, fut réalisée par Alfred. En 893 il eut encore à combattre une invasion des Danois commandés par Hasting. Il mourut en 900, un an après avoir déposé les armes.

Alfred le Grand avait pris pour modèle Charlemagne : il ne lui est pas resté inférieur. Ses mesures administratives sont mieux connues que ses actes législatifs. Les plus belles institutions anglaises lui sont attribuées, le jury entre autres. Persuadé que le meilleur moyen de rendre les hommes heureux est de les éclairer, il établit l’université d’Oxford, et y fonda une bibliothèque d’ouvrages qu’il fit venir de Rome. Le meilleur historien de son siècle, et poète remarquable, il encouragea les lettres, protégea les arts, attira les savants à sa cour, et fit sortir la nation anglaise de l’état d’apathie où l’avait plongé le despotisme des Danois.