Saint-Martin-de-Ré

  • L’Aunis et la Saintonge maritimes

Saint-Martin-de-Ré. L’origine de Saint-Martin est très ancienne ; elle parait remonter au viie siècle, où Eudes, duc d’Aquitaine, jeta dans l’Île de Ré les premiers fondements de cette localité qu’il consacra à Saint Martin ; ses accroissements furent lents, et ce n’est que vers le milieu du xve siècle qu’elle devint place forte et commença a figurer dans l’histoire.

La place de Saint-Martin n’avait pas une importance considérable lorsqu’en 1627 elle fut défendue par le maréchal de Thoiras, gouverneur de l’île, qui y soutint le siège mémorable de 140 jours, qui l’a rendu célèbre : elle fut fortifiée en 1689, sur le plan qu’en donna Vauban ; en 1689, on perfectionna les ouvrages exécutés. Le front de ces fortifications, tourné vers la mer, est magnifique. La citadelle actuelle, qui a remplacé les cendres glorieuses de celle de Thoiras, forme un carré parfait, sur le contour duquel s’élèvent quatre bastions, trois demi-lunes et une contrescarpe ; un fossé profond l’entoure et est surmonté par un chemin couvert ; elle commande le port, la ville et la campagne ; c’est un monument ayant tonte la sévérité de l’architecture militaire, et qui, depuis quelques années, a été mis à la disposition du Ministère de l’Intérieur, lequel en a fait un dépôt, pour les condamnés aux travaux forcés et les récidivistes, qui doivent subir la peine de la relégation au-delà des mers.

À l’extérieur de cette forteresse, et dans la partie faisant face à la porte d’entrée, il existe un petit port qui servait jadis à débarquer les vivres et les munitions destinas à la garnison de Saint-Martin ; il est presque comblé et ne peut recevoir que les chalands et embarcations de l’État, qui viennent y prendre périodiquement les forçats et les relégués, détenus temporairement à la citadelle, pour les transborder, en rade de Saint-Martin, sur les bâtiments de servitude du port de Rochefort, qui les portent ensuite au navire affrété, mouillé sous l’Île d’Aix, et chargé de les conduire à la Guyane française ou a la Nouvelle-Calédonie.

La ville de Saint-Martin, dont Louis XIV fit le centre administratif et militaire de l’île, s’élève en amphithéâtre et s’étend, demi circulairement, dans un rayon do 500m environ ; ses rues sont étroites, les quatre principales dirigées du Sud au Nord et les autres de l’Est à l’Ouest ; des souvenirs historiques se rattachent à plusieurs des maisons de celte ville, dont l’une appartint à Sully.

Le port de Saint-Martin est le plus important de l’île, Creusé en 1537, sur un fond de roches vives, ce ne fut qu’en 1685 que l’on revêtit ses quais de maçonnerie et que des cales de débarquement y furent disposées ; la construction des maisons qui bordent les rives du port date de l’an 1600.

Cet établissement maritime se compose d’une rade, d’un avant-port, d’un port d’échouage et d’un bassin à flot.

La rade est située à 2 kilomètres de rentrée entre la roche des Hattes, la balise du Couronneau et le banc du Preau ; son étendue est d’environ 2,000 mètres carrés, elle a des profondeurs de 12 a 5 mètres, et offre un abri assuré contre les coups du vont du Sud-Ouest, et de l’Ouest ; le fond, qui se compose de vase, mêlée de sable et de coquilles, y rend la tenue bonne ; toutefois, quand le vent passe brusquement au Nord-Ouest, la mer y creuse beaucoup, surtout avec le jusant.

Le chenal qui conduit de la rade dans l’avant-port passe sur des fonds de roches, recouverts de vase, qui s’étendent jusqu’à 350m environ de l’entrée et assèchent de 1m, aux basses mers de vive eau. Des deux côtés de ce chenal, la côte est bordée de roches plates et nues, qui assèchent à plus d’un demi mille du rivage ; les plus hautes sont du côté Est où elles forment la pointe du Couronneau.

L’avant-port, dont la longueur est de 120m et la largeur de 50, est abrité au Nord-Ouest par un mêle, en maçonnerie, de 130m de longueur, dirigé vers le Nord-Est quart Est et dont le musoir est éclairé, depuis le 1er juin 1884, par un petit feu vert ; le côté Sud est formé parmi bastion des fortifications, à l’entrée duquel on a construit, en 1881, un pan coupé en remplacement d’un angle des fortifications qui gênait les manœuvres des navires, et un éperon de 27m de longueur, destiné à protéger l’avant-port contre les vents d’Est. Sur l’angle du bastion ou a élevé, en 1844, une tour en maçonnerie, surmontée d’un feu fixe rouge, servant à guider, pendant la nuit, les navires arrivant du large ; ce feu de port a été allumé le 1er mars 1845, et a remplacé le fanal, à feu blanc fixe, qu’il y avait auparavant.

L’avant-port communique, par une ouverture de 18m, pratiquée dans les fortifications, avec le port d’échouage qui s’étend vers le Sud-Sud-Ouest sur une longueur de 250m environ et une largeur moyenne de 50, entre les murs de quais ; au pied de l’un de ces quais, il existe un gril de carénage, ayant 52m de longueur.

Le bassin à flot est situé dans l’Ouest du port d’échouage ; il est formé de deux branches a angle droit, dont l’une, dirigée vers le Nord-Est quart Est, a 225m de longueur, sur 42 de largeur, et l’autre, dirigée vers le Sud-Est quart Est, a 100m de longueur, sur 32 de largeur. Ce bassin, qui fut creusé en 1837, dans les fondations d’un quartier rasé de la ville, et terminé en 1847, communique avec le port, dans la partie Nord, par une écluse ayant 12m de largeur, dont le seuil est a 0m80 au-dessus du zéro, et, dans sa partie Sud, par un aqueduc de 1m50 d’ouverture, qu’on a laissée dans l’ancienne écluse, pour servir à chasser les vases du fond du port ; ce bassin, dont le plafond est dragué à la cote 1,30, a une superficie de 1 hectare 15 ares, il est entouré de quais ayant 547m50 de developpement. Une cale d’abatage en carène, de 70m de longueur, est établie au quai Ouest, et une cale de construction est installée dans la partie Est.

Le bassin a flot de Saint-Martin eut, à l’origine, son entrée au fond du port d’échouage, c’est-à-dire dans la partie la plus commode, et à proximité du centre du commerce et de l’industrie de la localité ; cette entrée, bien comprise, permettait aux navires venant de la rade ou du large, de manœuvrer facilement, sur un parcours assez étendu, et sans beaucoup diminuer leur vitesse avant d’y arriver. Cet état de choses dura un certain nombre d’années, à la satisfaction générale, et surtout à celle des navigateurs ; mais, un jour on apprit, non sans surprise, qu’il était question de changer l’entrée du bassin et de la mettre près de l’ouvert du port, ce qui parut étrange. Le commerce, les pilotes et les marins s’émurent de ce projet qui provoqua de nombreuses et justes critiques, lesquelles ne le firent ni abandonner, ni même ajourner, parce qu’il s’inspirait de considérations touchant à des intérêts particuliers, que l’on voulait favoriser.

L’entrée du bassin fut donc placée où elle est actuellement, et à l’entrée du port d’échouage, à l’extrémité du petit quai parlant du point où était jadis la chaîne que l’on tendait le soir, pour fermer le port pendant la nuit.

Cette modification n’a pas été heureuse, et elle n’a créé que des inconvénients pour les navires, à voiles, d’un fort tonnage, qui, après avoir pénétré dans le port, voudraient entrer immédiatement au bassin, afin de ne pas échouer. Et si Saint-Martin recevait encore, comme autrefois, beaucoup de grands terre-neuviers, pour y charger des sels dans le bassin, au moyen d’allèges qui les leur apportaient, des plaintes se seraient proqui les ou se produiraient, eu raison de ce qu’il est difficile, pour un bâtiment arrivant dans le port, par grosse mer, de ne pas faire d’avaries, lorsqu’il lui faut, à peine engagé entre les deux murs formant l’entrée du port, venir brusquement sur tribord, avec toute sa vitesse, pour trouver l’entrée du bassin.

On parle de rétablir la dite entrée où elle était priminitivement, ce qui serait rationnel, mais coûteux.

Le port a souvent du ressac l’hiver, avec des vents de Nord-Ouest et de Sud.

Saint-Martin fut jadis un centre commercial et maritime très important ; de nombreux navires, tant français qu’étrangers, y apportaient, des pays dit Nord de l’Europe, des cargaisons de bois, fers, goudrons, etc. C’était alors l’entrepôt et le marché de la région pour ces marchandises. L’industrie salicole amenait également, dans son port, beaucoup de navires, qui venaient y charger des sels verts, pour la pêche de la morue ; mais, depuis un demi-siècle environ, les armateurs des ports de Dieppe, Fécamp, Granville, Paimpol, Binte et autres, n’envoient plus que très rarement leurs terre-neuviers prendre des sels à Saint-Martin, parce qu’ils ont, à meilleur compte, les sels étrangère, qui font aux nôtres une concurrence ruineuse, laquelle a amené la mévente de ce produit, dont le cours est tombé à 7 francs les 1,000 kilogrammes, pour les sels de l’Île de Ré.

Les chemins de fer et les bateaux à vapeur ont, en même temps, porté un coup terrible au cabotage, par navires à voiles, qui était autrefois très actif à l’Île de Ré. On trouvera un signe de la décadence commerciale de Saint-Martin dans ce fait que : il y a cinquante ans à peine, le service des Douanes était dirigé dans cette localité par un Sous-Inspecteur, qui avait, auprès de lui, un receveur principal, et un personnel de plusieurs vérificateurs et commis, tandis qu’à présent, un seul fonctionnaire, le receveur particulier, suffit pour assurer le service. Cette décadence regrettable s’est produit, dans l’île, ailleurs qu’à Saint-Martin, et en présence de la diminution considérable constatée dans les expéditions qui se font par navires caboteurs, l’Administration des Douanes a, tout récemment, remplacé les deux receveurs particuliers des bureaux de La Flotte et de Loix, par de simples receveurs-buralistes.

Parmi les curiosités de Saint-Martin, on peut citer, après la citadelle : 1° les casernes, situées à l’Est de la ville, et qui pourraient contenir environ 1,100 hommes ; elles n’ont actuellement que les quatre compagnies du 123e régiment d’infanterie qui, avec une batterie d’artillerie, composent la garnison de cette place ; en face, s’étend une superbe esplanade, dont le côté gauche est planté d’une double et belle rangée d’ormeaux ; 2° les fortifications, qui entourent la ville ; 3° les remparts, formant une très agréable promenade ; 4° l’arsenal, bel établissement militaire, dont le portique sculpté est du xvie siècle ; 5° l’église paroissiale, construction du xiie siècle, avec crypte, soutenant les restes de l’ancienne église, qui fut ruinée, en partie, par la flotte anglo-hollandaise, en 1696 ; la longueur du transept de cet édifice religieux est de 37m et sa largeur de 10m ; les mâchicoulis ont une hauteur de 7m80 au-dessus du sol ; à l’extérieur, et dans lu partie Sud-Est, s’élève une tourelle, couronnée par une flèche conique, ayant 4m50 de hauteur. Les ruines de la vieille église aérienne sont entretenues, avec soin, car elles servent d’amer aux navigateurs. venant par le Pertuis Breton. Le clocher, construit en 1784, n’a rien de remarquable.