Anathème

  • Histoire religieuse
  • Ch. Cassou
  • Encyclopédie moderne

Anathème. Suivant le sens originel du mot, on peut concevoir que cette chose a été mise à part, ou dans un but de consécration et de privilège, ou dans un but de proscription. Les deux acceptions eurent cours, en effet, dans les premiers siècles ; et il n’est pas rare de trouver dans les Pères de l’Église le mot anathème employé pour désigner les offrandes et les ex-voto que la piété ou la reconnaissance des fidèles consacrait à la Divinité dans les temples, Toutefois, cette dernière acception ne s’est pas conservée, et le mot a eu, dans tout le moyen âge, un retentissement terrible.

L’anathème ne s’entend donc plus.que d’une sentence qui rejette hors du sein de la société religieuse ceux qui en sont atteints.

Toutes les religions de prosélytisme, appuyées sur une révélation particulière de la Divinité, se sont servies de l’anathème contre des membres dissidents ou ennemis ; mais le catholicisme a plus particulièrement donné à cette condamnation une forme systématique. En cela, il imitait le judaïsme. Le mot anathème est l’équivalent du mot hébreu cherem, qui signifie perdre, détruire, exterminer. La Bible offre plusieurs exemples d’anathème ou de cherem, porté au nom de la Divinité. Moïse veut qu’on voue à l’anathème les villes des Chananéens qui ne se rendront pas aux Israélites, et ceux qui adoreront les faux dieux (Deut. VII, 2,26 ; Exod. XXII, 19). Le peuple hébreu, assemblé à Maspha, dévoue à l’anathème quiconque ne marchera pas contre ceux de Benjamin, pour venger l’outrage fait à la femme d’un jeune lévite (Juges, XIX). Saül dévoue à l’anathème quiconque mangera avant le coucher du soleil dans la poursuite des Philistins (Rois, 24). Chez les Juifs l’anathème emportait la mort.

L’Église chrétienne n’avait pas, comme le judaïsme, de sanction terrestre ; elle ne prononça l’anathème qu’en vue de la vie future. Plus terrible que l’excommunication, qui n’était qu’une séparation momentanée de la communion des fidèles, l’anathème avait pour résultat de dévouer aux feux éternels ceux qui l’avaient encouru. Il fut ordinairement porté contre les hérétiques qui combattaient les dogmes ou la souveraineté de l’Église ; presque tous les décrets des conciles, tant généraux que particuliers, appelés à décider des questions de foi, se terminaient par une suite d’anathèmes contre quiconque soutiendrait l’opinion qu’ils venaient de condamner, ou en émettrait de contraires aux déclarations promulguées. La formule ordinaire était celle-ci : Si guis dixerit… negaverit… anathema sit.