Adolescence

  • Physiologie
  • A. Le Pileur
  • Encyclopédie moderne

Adolescence. Adolescentia, passage de l’enfance à l’âge adulte. Tel est en effet le temps de la vie qu’on a désigné par ce mot. Au début de l’adolescence les phénomènes de la seconde dentition sont finis. Le cerveau prend de l’accroissement, le crâne s’élargit, notamment vers l’occiput, et les organes génitaux, jusqu’alors à l’état rudimentaire, prennent un développement rapide. Chez l’homme, le larynx augmente de volume et acquiert plus de force ; il devient proéminent dans la partie moyenne et forme au-devant du cou cette saillie qu’on a nommée vulgairement la pomme d’Adam. La voix de l’adolescent se voile pendant quelque temps, puis au timbre féminin qu’elle avait dans l’enfance, succède le timbre viril. La poitrine s’élargit ; le cœur grossit et augmente de force au point de se trouver souvent à la gêne dans le thorax dont le développement est plus lent ; le sang devient plus riche et, sous l’influence d’une circulation plus active, les muscles prennent une teinte plus rouge, augmentent de volume et dessinent sous la peau leurs saillies franchement accusées. La même cause en amenant dans les poumons et vers les muqueuses une quantité de sang plus grande et lancée avec plus de force, détermine les hémorrhagies si fréquentes à cet âge. La taille s’accroît rapidement, toutes les fonctions vitales prennent une grande énergie, et le besoin de faire face à cette dépense de forces se traduit par un appétit presque insatiable. Les traits du visage prennent un caractère différent ; les os propres du nez se développent ainsi que le maxillaire inférieur, dont les proportions augmentent. La barbe commence à croître, tandis que sur plusieurs points du corps la peau se couvre de poils.

Chez la jeune fille, les changements anatomiques sont moins marqués. La voix reste à peu près la même, la poitrine n’acquiert pas en proportion autant de capacité que chez l’homme, mais les glandes mammaires se développent, les muscles en augmentant de force ne se prononcent pas autant sous la peau, les traits du visage changent moins aussi, mais le bassin s’élargit dans des proportions toutes nouvelles ; les organes génitaux sortent de leur sommeil embryonnaire, et une nouvelle fonction se prépare. Les ovaires grossissent, des vésicules s’y montrent et font à leur surface des saillies mamelonnées ; le sang afflue vers l’utérus ; enfin, après quelques crises plus ou moins orageuses, les règles s’établissent.

Dans les deux sexes, l’état moral ne change pas moins que l’état physique. Au besoin de mouvement, à la gaieté bruyante et insouciante de l’enfance succèdent une timidité gauche et une gêne qui semblent révéler la première conscience du moi. L’adolescent est triste, il recherche la solitude, une inquiétude vague le tourmente, il est agité de désirs qu’il ne peut préciser aux autres ni à lui-même.

C’est alors qu’il importe de venir en aide à la nature en développant le système musculaire par un exercice doublement utile, car il donne la force au corps et par la fatigue amène un sommeil réparateur, en même temps qu’il détourne l’attention de pensées dont les suites pourraient être funestes. Les exercices violents doivent donc figurer en première ligne, dans l’hygiène de l’adolescence ; cependant on ne doit pas oublier que le cœur est toujours alors hypertrophié proportionnellement à la poitrine, et que l’abus ou l’usage peu judicieux d’un moyen, précieux du reste, pourrait avoir des conséquences fâcheuses de ce côté.

Deux points doivent encore fixer l’attention à cet âge. Souvent alors la maladie scrofuleuse qui s’est manifestée pendant l’enfance par de nombreux, symptômes, s’efface après avoir porté un dernier coup, pour ne plus reparaître ou ne se montrer que beaucoup plus tard. Souvent aussi l’on voit la phthysie se dessiner et marcher rapidement vers une terminaison funeste, ou ne laisser la vie au malade que pour la lui ravir, de vingt à trente ans.

Les phénomènes d’évolution rapide qui se succèdent pendant l’adolescence sont nécessairement une cause de maladies nombreuses. Les congestions, toutes normales de sang et de force vitale qui se font vers les organes principaux, dépassent souvent le but et sont la cause première de plusieurs affections morbides et surtout de phlegmasies. Toutefois l’homme, à cet âge comme aux autres, est soumis à l’influence des constitutions médicales du pays qu’il habite, et l’on ne peut établir de règles fixes pour le traitement ou la prophylaxie d’affections qui varient après des périodes de durée plus ou moins longues. C’est ainsi qu’après le règne presque sans partage des inflammations gastro-intestinales franches, on voit maintenant la fièvre typhoïde dominer surtout dans l’adolescence. Longtemps on a cru devoir répandre hardiment le sang à cette époque de la vie ; la diète ou un régime alimentaire très modique étaient de règle pour la moindre indisposition, sinon dans l’état de santé ; les toniques étaient rejetés presque d’une manière absolue, et dans tout cela on était parfaitement d’accord avec la constitution inflammatoire qui sévissait alors. Aujourd’hui c’est tout différent. Loin de nous la pensée de proscrire la diète, ce moyen qui, judicieusement employé, peut être l’arme la plus puissante contre la maladie ; nous voulons seulement nous mettre en garde contre les conséquences déplorables d’un régime débilitant, prescrit sans mesure à l’époque où les organes ont le plus besoin d’être soutenus dans leurs efforts d’accroissement. C’est surtout chez les femmes que cette erreur est funeste : nous avons vu des résultats bien tristes de la diète, des bains tièdes, des sangsues, du régime lacté, chez des jeunes filles qui, maintenant adultes, traînent une vie languissante. Nous avons vu aussi les bains de mer ou de rivière, le bœuf rôti, le vin, la gentiane, réussir à merveille, soit pour prévenir le mal, soit pour ramener à la santé des constitutions qui fléchissaient sous un régime opposé.