Escurial

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Escurial. En espagnol Escorial. Ce nom est celui d’un bourg situé dans le royaume de la Vieille-Castille, province de Ségovie, à treize lieues de Madrid. Il se trouve sur la pente méridionale des montagnes de Guadarama, au milieu d’une contrée déserte, où soufflent la plupart du temps des vents d’une violence extrême. Malgré cette position peu avantageuse, Philippe II choisit cet endroit pour y accomplir le jrœu auquel il croyait devoir le gain de la bataille de Saint-Quentin. Il avait promis d’élever, en l’honneur du saint dont on célébrait ce jour-là la fête, le plus magnifique monastère qui fût au monde. C’était le 10 août 1557, jour de Saint-Laurent. Le roi d’Espagne, vainqueur, se souvint de son vœu ; les architectes se mirent à l’œuvre, et en 1563 commença la construction de l’édifice promis. Il fut terminé en 1584, et appelé San-Lorenzo el Real. Mais l’usage lui a conservé le nom du bourg où il fut bâti, et l’immense édifice, devenu à la fois un riche monastère, une des résidences habituelles des rois d’Espagne, et le lieu de leur sépulture, s’appelle pour tout le monde l’Escurial.

Le premier effet que ce palais-couvent produit sur le spectateur est une sensation d’étonnement, résultat de ses proportions colossales. Quant à la disposition générale, elle est loin d’être heureuse. Afin de rappeler l’heureuse intervention du saint auquel était consacré le monument, et de constater que la reconnaissance du monarque s’adressait bien à son bienfaiteur, on a voulu que l’ensemble de l’édifice remit dans la mémoire le supplice du bienheureux saint Laurent, et le plan dut affecter la forme de l’instrument qui servit à son martyre. A cet effet, dix-sept corps de bâtiments se croisent à angle droit, et renferment dans leur enceinte vingt-deux grandes cours, simulant ainsi un gril renversé, dont les pieds sont représentés par quatre tours élevées aux quatre coins de l’édifice. Le parallélogramme a deux côtés un peu plus longs que les deux autres, et c’est sur ces deux côtés que se trouvent les deux principales façades, qui se déploient sur un espace de six cent trente-sept pieds,et dont l’une est percée de plus de deux cents fenêtres. Aussi l’édifice, bâti tout entier d’une pierre grise qui se trouve dans les environs, présente-t-il au dehors l’aspect d’un hôpital ou d’une caserne. L’architecture, en effet, a pour principal caractère une simplicité sérieuse. La seule façade de l’occident possède un beau portail, par lequel on parvient à une egur carrée, dont le fond est occupé par l’église. Cette entrée principale ne s’ouvre, pour les rois d’Espagne et pour les princes de leur maison, que dans deux occasions solennelles, au commencement et à la fin de leur vie : la première fois, lorsqu’après leur naissance ils sont portés à l’Escurial ; la seconde, lorsque leur cadavre va occuper la place qui lui est réservée dans l’église.

Celle-ci a la forme d’une croix grecque surmontée d’une coupole et de deux tours. L’architecture en est simple et majestueuse ; on y arrive, du côté de la cour intérieure, par un escalier et un portique, au-dessus duquel sont placées six statues colossales. L’intérieur est orné de marbres et de peintures à fresque dues au pinceau de Lucas Jordano. Un grand nombre de tableaux précieux, signés des noms les plus illustres, se voient dans les deux sacristies. Le maître-autel, tout éclatant de matières précieuses, est placé sur une estrade élevée où conduit un magnifique escalier. Enfin, au-dessous de l’église, s’étendent les caveaux destinés aux sépultures royales, et dans lesquels, comme dans l’église même, le marbre et le bronze sont prodigués.

L’Escurial renferme une bibliothèque, moins remarquable par le nombre et le choix de ses livres imprimés que par la beauté de son vaisseau et la quantité de manuscrits grecs et arabes qu’elle contient. Auprès du palais s’étendent des jardins immenses.

Malgré ses défauts, la tristesse de son aspect, la bizarrerie de son plan, l’Escurial n’en est pas moins un des plus remarquables édifices de l’Espagne. On en doit l’idée et l’exécution à l’architecte Louis de Foix ; sa construction dura dix-neuf ans ; elle a coûté 52,727,000 francs.

Comme nous l’avons déjà dit, l’Escurial est une résidence royale. La cour y habite pendant une partie de l’année. Il sert, en outre, de demeure à cent cinquante moines hiéronymites. Auprès du couvent se trouvent deux maisons de campagne, appartenant, l’une au roi, et l’autre au prince des Asturies. Le village d’Escurial, qui possède deux mille habitants, n’a ni industrie ni commerce. Il ne vit que des ressources intermittentes que lui apporte le séjour momentané de la cour.