Alluvions

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Alluvions. On nomme alluvions, en géologie, tous les dépôts formés par les eaux courantes et sauvages, quelle que soit la nature de ces dépôts. Quand un courant d’eau passe sur des roches facilement désagrégeables, il en emporte une portion proportionnelle à sa vitesse et à son volume. Les matières minérales, ainsi transportées, étant plus denses que l’eau, ne peuvent être tenues en suspension dans ce liquide qu’en vertu de sa vitesse ; et, comme l’action de la pesanteur tend à chaque instant à diminuer l’action de cette vitesse, il en résulte que, des corps tenus en suspension, ce sont les plus pesants qui se déposent les premiers. C’est effectivement d’après ce principe que se trouvent distribués les matériaux le long des cours d’eau : des fragments de la même roche, partis d’un même point, les plus gros sont les plus voisins du lieu de départ, et les autres se succèdent, en diminuant de volume, jusqu’à l’embouchure du cours d’eau, ou jusqu’à l’endroit où sa vitesse est anéantie. Là, ne se trouvent plus que les matières tenues : les sables et le limon.

En suivant le cours d’une rivière, on remarque, dans le lit, que les alluvions forment des angles rentrants, opposés à des angles saillants, formés par une berge escarpée. Tous les obstacles, rochers, piles de pont, arbres, etc., qui se trouvent dans le lit d’un cours d’eau , occasionnant une diminution de vitesse, déterminent un dépôt d’alluvions.

Les fleuves et les rivières dont les inondations sont fréquentes, la Saône, la Loire, le Nil, etc., ont formé, de chaque côté de leurs rives, des dépôts d’alluvions considérables. Ces dépôts s’étendent en plans inclinés, qui s’abaissent à mesure que l’on s’éloigne des bords de la rivière, en sorte que, dans les inondations, la ligne de couronnement de ces berges est la dernière couverte. Voici comment se forment ces dépôts latéraux : le liquide qui arrive abondamment dans le lit d’un cours d’eau, après les pluies et la fonte des neiges, chargé d’une quantité de débris pierreux et autres, en augmente tellement le volume, que l’eau passe bientôt par les échancrures des berges, pour se répandre sur le terrain plat, sur la prairie, traversée par le cours d’eau. A mesure que l’eau s’étend latéralement, elle perd sa vitesse et dépose les matériaux qu’elle tenait en suspension. Il se forme ainsi, à chaque inondation, une couche mince ; et le même phénomène se répétant un grand nombre de fois, le dépôt acquiert, avec le temps, une épaisseur considérable. Il résulte de là que les rivières dont les berges d’alluvions sont les plus élevées, se trouvent justement être celles dont les inondations sont les plus fréquentes.

On conçoit que de pareils dépôts doivent renfermer les débris de toutes les roches lavées par les cours d’eau et leurs affluents, ainsi que ceux des animaux et des végétaux qui vivent dans la contrée, mélangés avec de nombreuses traces de l’industrie humaine. C’est effectivement ce qui a lieu : la partie inférieure du grand dépôt d’alluvions des rives de la Saône renferme des fragments d’armes et de poteries celtiques ; plus haut, on trouve des poteries et des médailles romaines ; enfin, viennent les débris de l’industrie des Français, et, avec tout cela, des fragments des végétaux et des animaux qui habitent la contrée. Ces dépôts d’alluvions sont souvent considérables et s’accroissent rapidement : celui du Nil, qui couvre toute la basse Égypte, a élevé d’environ deux mètres le sol de cette contrée depuis le commencement de l’ère chrétienne.

Les delta que forment les rivières et les fleuves à leur embouchure dans les lacs ou dans la mer, sont des dépôts d’alluvions.

Les alluvions caillouteuses, qui sont fréquentes dans les montagnes, et les alluvions sableuses (lits de la Loire, du Rhône et du Rhin), perdent plus ou moins complètement le sol qu’elles recouvrent. Les alluvions limoneuses, au contraire, lui donnent une grande fertilité (celles du Nil, de la Saône, de la Seine, etc.)

Les eaux entraînent, avec les débris des roches, les métaux et les minéraux précieux qu’elles renferment ; mais ces substances ne pouvant être transportées fort loin, à cause de leur grande densité, finissent par s’accumuler sur certains points et par y former des gîtes trés-riches. C’est ainsi qu’ont été produits les fameux terrains aurifères et diamantifères de l’Amérique, de la Russie et de certaines parties de l’Afrique, dont on a retiré de si grandes richesses.

Indépendamment des alluvions formées par les eaux douces, il y en a qui sont formées par les eaux marines ; de là deux divisions : alluvions d’eaux douces et alluvions marines. Dans le flux, la mer se répandant sur le sol plat des côtes, y dépose une mince couche de vase ou de sable, à laquelle chaque pleine mer vient en ajouter une nouvelle* On conçoit qu’ainsi le dépôt doit croître rapidement ; c’est ce qui arrive principalement en Hollande, pays dont la plus grande partie du sol a été formée de cette manière. Les courants qui longent les côtes y forment aussi des dépôts analogues à ceux des fleuves et des rivières.

Les alluvions marines renferment, et souvent en abondance, des débris d’animaux et de végétaux marins, de navires, et même des navires entiers (la Rochelle, Aigues-Morles).

La surface des grandes plaines et le fond des grandes vallées sont ordinairement recouverts d’un puissant terrain d’alluvions, qui s’élève aussi jusqu’à une certaine hauteur sur les pentes des montagnes, et dont la formation. ne peut pas être attribuée aux causes actuellement agissantes. Ce terrain étant nommé diluvien.