Catholicité

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Catholicité. Qualité de ce qui appartient à l’Église catholique, aux doctrines, aux pasteurs, aux fidèles composant cette Église. Ce mot, dérivé du grec, signifie, dans le sens étymologique, ce qui est universel, c’est-à-dire conforme à la croyance de l’Église chrétienne, universelle, de celle qui est la tige originaire de toutes les autres communions chrétiennes. Le catholicisme est le système de religion professé dans cette Église ; il a trois grands caractères : la perpétuité, l’unité, l’immutabilité dans les doctrines relatives à la foi. On les trouve développés dans l’excellente Histoire des variations, etc., par Bossuet, et dans un autre ouvrage digne d’être placé à côté du premier : l’Histoire critique des projets formés depuis trois cents ans pour la réunion des communions chrétiennes, par M. Thabaraud, ancien prêtre de l’Oratoire ; Paris, 1824, in-8°, 1 vol.

La Charte (art. 5, 6, 7) reconnaît à chacun une égale liberté de professer sa religion, et assure à chacun pour son culte la même protection ; cependant les ministres de la religion du plus grand nombre en France, la religion catholique, apostolique et romaine, et ceux des autres cultes chrétiens, reçoivent seuls des traitements du trésor royal. Dans notre Essai de traité historique et politique sur la Charte, livre II, chap. 6, nous croyons avoir donné sur ces trois articles un commentaire conforme au catholicisme, à l’esprit de la Charte, à la raison universelle.

La religion fondée par Jésus-Christ et ses apôtres au premier siècle de notre ère s’appela chrétienne, après avoir été d’abord celle des Juifs Nazaréens, ou Naziréens, selon Épiphane ; ce nom de chrétien a selon les Actes des Apôtres, commencé à Antioche, vers l’an 45, avant la famine qui régna en Palestine sous le règne de Claude. Selon Tacite (si son texte n’a pas été interpolé), ce nom était connu à Rome en 64, lors de l’incendie de cette ville par Néron ; toutefois, la lettre de Pline le Jeune à Trajan, et la réponse de ce prince au gouverneur de la Bithynie, semblent prouver que les chrétiens n’étaient pas encore connus à Rome vers l’an 110 de notre ère : ils n’y avaient dans tous les cas, ni église, ni culte public, ainsi que le prouve le dialogue de Minucius Félix, l’un des Pères de l’Église ; ils n’avaient que des réunions secrètes, auxquelles ils se rendaient probablement sous le titre de Juifs.

Quoi qu’il en soit, à peine le christianisme fut-il fondé en Orient, qu’il fut déchiré par les sectes. Irénée, vers l’an 180, et Épiphane, dans le quatrième siècle, ont donné la nomenclature et les tendances de ces premières hérésies.

La grande querelle de l’arianisme, sous Constantin, dans laquelle on contestait à Jésus-Christ, au moins en partie, son essence divine, et qui divisa le monde, obligea les chrétiens trinitaires à se distinguer par le titre d’orthodoxes.

La toute-puissance impériale les favorisa sous Théodose Ier : ce prince eut la prétention, qu’il ne put réaliser, malgré et peut-être à cause de la cruauté de ses lois, de ramener tous les dissidents à l’unité et de faire une Église universelle. Ce fut lui qui, par un édit du 3 des calendes de mars de l’année 380, donné à Thessalonique. et adressé par lui et par Gratien et Valentinien, ses associés à l’empire, au peuple de Constanlinople, créa le titre de catholiques. Voici les termes de cette loi célèbre :

« Nous voulons que tous les peuples soumis au gouvernement tempéré de notre clémence ne professent d’autre religion que celle qui a été transmise aux Romains par le divin apôtre Pierre, et que la religion elle-même nous enseigne avoir élé continuée jusqu’à ce jour ; celle que le pontife Damase et Pierre, évêque d’Alexandrie, personnages d’une sainteté apostolique, professent ; c’est-à dire celle qui veut que, selon la discipline apostolique el la doctrine évangélique, nous croyions à un seul Dieu, composé du Père, du Fils et du Saint-Esprit , revêtus d’une égale majesté et formant une pieuse Trinité. Nous voulons que ceux qui suivent celle loi portent le nom de chrétiens catholiques. Notre jugement est que les autres sunt des hommes en démence et stupides ; ils soutiennent l’infamie du dogme hérétique ; leurs conciliabules ne méritent pas le nom d’églises ; ils seront punis d’abord par la vengeance divine, et ensuite par celle que l’inspiration céleste nous suggérera. »

Cette loi d’intolérance et de fanatisme est la deuxième du titre 1er du livre XV et dernier du Code de Théodose le Jeune.

La peine prononcée contre les hérétiques fut la peine capitale. ; elle fut étendue à ceux qui faisaient de la controverse en matière religieuse (loi de 386). On ordonna que tous les livres contraires à la foi catholique fussent brûlés, et c’est ainsi qu’ont disparu les écrits non-seulement des adversaires de la religion chrétienne, comme Celse, Hiéroclès, Porphyre, Julien, etc., mais encore les livres des gnostiques, de Paul de Samosate, des ariens et autres.

L’Église d’Orient, en se séparant, dans le neuvième siècle, par l’influence du savant patriarche Photius, de l’Église latine ou romaine, conserva le litre de catholique ; alors celle-ci ajouta à cette qualification celle apostolique.

Au seizième siècle, un autre grand homme, Luther, en se séparant à son tour de l’Église romaine, donna à son culte réformé le titre d’Église évangélique.

Combien ne serait-il pas désirable que tous les hommes religieux qui vénèrent Jésus-Christ, restassent unis sous le beau titre de chrétiens ? Est-il permis de se proclamer catholique, quand on voit une portion considérable de la famille humaine résister depuis dix-huit siècles à la fusion, et ne pas reconnaître Jésus pour le véritable interprète de la morale universelle et pour le fondateur de la vraie religion ?