Anatomie comparée

  • Encyclopédie de famille

Anatomie comparée. C’est la science de l’organisation des animaux ; elle expose les différences et les analogies que présentent les systèmes organiques ans toute la série animale. L’anatomie comparée a servi de base à la classification des animaux la plus généralement adoptée de nos jours. C’est la source solide et féconde où la physiologie a puisé ses théories les plus évidentes ; car c’est par elle seule que l’on observe, que l’on compare, que l’on juge les différentes modifications d’un organe remplissant une fonction analogue ou semblable dans toute l’échelle des êtres.

Après avoir comparé l’organisation chez tous les êtres animés et ses diverses formes à ses diverses périodes, l’anatomie comparée prend le nom d’anatomie philosophique, transcendante ou spéculative quand elle étudie l’organisation en elles-ême pour en expliquer les lois. Cuvier a exposé clairement la principale loi de l’anatonrie philosophique, la loi des conditions d’existence. « Dans l’état de vie, dit-il, les organes ne sont pas simplement rapprochés, mais ils agissent les uns sur les autres et concourent tous à un but commun. Les modifications de l’un d’eux exercent une influence sur celles de tous les autres. C’est sur cette dépendance mutuelle des fonctions et ce secours qu’elles se prêtent réciproquement que sont fondées les lois qui déterminent les rapports de leurs organes, et qui sont d’une nécessité égale à celles des lois mathématiques. Tout être organisé forme un ensemble, un système unique et clos, dont les parties se correspondent mutuellement, et concourent à la même action définitive par une réaction réciproque. Par conséquent chacune d’elles, prise séparément, indique et donne toutes les autres. Ainsi, si les intestins d’un animal sont organisés de manière à ne digérer que de la chair et de la chair récente, il faut aussi que ses mâchoires soient construites pour dévorer une proie, ses griffes pour la saisir, et la déchirer, ses dents pour la couper et la diviser ; le système entier de ses organes du mouvement pour la poursuivre et pour l’atteindre ; ses organes des sens pour l’apercevoir de loin ; il faut même que la nature ait placé dans son cerveau l’instinct nécessaire pour savoir se cacher et tendre des pièges à ses victimes. Telles sont les conditions générales du régime carnivore ; tout animal destiné pour ce régime les réunira infailliblement, car sa race n’aurait pu subsister sans elles ; mais sous ces conditions générales il en existe de particulières, relatives à la grandeur, à l’espèce, au séjour de la proie pour laquelle l’animal est disposé, et de chacune de ces conditions particulières résultent des modifications de détail dans les formes qui dérivent des conditions générales : ainsi non-seulement la classe, mais l’ordre, mais le genre, et jusqu’à l’espèce,se trouvent exprimés par la forme de chaque partie. En un mot, la forme de la dent entraîne la forme du condyle, celle de l’omoplate, celles des ongles, tout comme l’équation d’une courbe entraîne toutes ses propriétés ; et de même qu’en prenant chaque propriété séparément pour base d’une équation particulière, on retrouverait et l’équation ordinaire et toutes les autres propriétés quelconques, de même l’ongle, l’omoplate, le condyle,. le fémur et tous les autres os pris séparément donnent la dent ou se donnent réciproquement ; et en commençant par chacun d’eux, celui qui posséderait rationnellement les lois de l’économie organique pourrait refaire tout l’animal. » C’est par cette voie que Ouvrer parvint à retrouver des espèces et des genres entiers fossiles qui ont disparu de la surface de la terre depuis les derniers cataclysmes, et qu’il a créé la paléontologie.

À cette loi générale Geoffroy Saint-Hilaire a ajouté le principe des connexions, qui repose sur la dépendance mutuelle, nécessaire et par conséquent invariable des parties. Dans beaucoup de circonstances le principe est incontestable en application comme en théorie : ainsi les organes des sens se rattachant par les nerfs qui les constituent au centre principal du système nerveux, on arrive avec certitude de l’œil au cerveau parle nerf optique ; mais ce principe abandonne souvent 1 anatomiste, surtout lorsqu’on cherche à le reconnaître dans le dédale des animaux invertébrés. La loi des répétitions organiques a pour base ce principe que chaque partie de l’univers est faite sur le modèle du tout, et chaque division de la partie sur le modèle de celleci ; cette hypothèse, qui part d’une pensée vraie et sublime, l’unité de composition et de pensée créatrice, a donné naissance à l’hypothèse du développement graduel et successif des organismes. Le spectacle surprenant des métamorphoses qu’éprouvent les reptiles batraciens et les insectes a fait admettre dans cette science que les fœtus des animaux supérieurs passent par tous les degrés inférieurs de l’organisation, à partir de celle du polype, avant d’atteindre leur perfection organique. Cette loi a rencontre des contradictions, quoique la doctrine des monstruosités par défaut ou arrêt de développement lui doive un singulier attrait de probabilité.

L’anatomie comparée a été connue dès une haute antiquité ; les prêtres de Thè- bes et de Memphis avaient certainement des notions sur cette partie de la science anatomique. Le premier livre d’histoire naturelle d’Aristote est un véritable traité d’anatomie comparée. Érasistrate étudia aussi l’anatomie comparée, ainsi que plus tard Galien. Au quatorzième siècle, les travaux de Vesale, de Colombus, de Bé- renger, de Carpi et d’Harvey enrichirent son domaine d’un grand nombre de faits nouveaux. Le Napolitain Marc-Aurèle Severin eut l’idée d’en faire une science isolée. Stenon, Malpighi, Ruysch et Swam- merdam étudièrent les insectes et leurs métamorphoses ; Redi et Leeuwenhoeck découvrirent un monde nouveau au moyen du microscope ; Haller, Spallanzani ap- pliquèrent l’anatomie comparée à la phy- siologie. Il faut encore citer les travaux de Riolan, de Perrault, de Méry, de Réau- mur, de Duverney, de Ferrein, de Petit et de Bernard de Jussieu. Depuis Daubenton, Buffon et Vicq-d’Azur, elle forme une branche essentielle de l’histoire natu- relle générale. Cuvier la porta au plus haut degré de développement et de clarté. Parmi ses élèves et ses successeurs il faut citer Blumenbach, Étienne Geoffroy Saint- Hilaire, de Blainville, Duméril, Carus, Meckel, Duvernoy, Serres, Isidore Geof- froy Saint-Hilaire, Magendie, Breschet, Flourens, Dutrochet, Cloquet, etc., etc»