Anacréon

  • Encyclopédie de famille

Anacréon, célèbre poète grec, naquit à Téos, en Ionie, vers l’an 572 avant J.-C. Platon le fait descendre d’une des plus illustres familles de la Grèce, et place, même le dernier roi d’Athènes, Codrus, au rang dé ses ancêtres. Étant fort jeune encore, il suivit avec ses parents une colonie de Téiens, qui pour échapper au joug des Perses émigra à Abdère sur les côtes de Thrace. Polycrate, tyran de Samos, l’attira à sa cour. Quelques auteurs rapportent qu’ayant reçu du tyran une somme assez considérable, à condition qu’il habiterait son palais, Anacréon se hâta, le lendemain même de ce marché, de lui reporter l’argent qu’il avait accepté, disait-il, trop légèrement, le conjurant de lui rendre sa liberté, et avec elle ses chansons et sa gaieté. Il paraît certain, malgré ce récit, qu’il passa à Samos, auprès de Polycrate, les plus belles années de sa vie, vivant dans son intimité, au milieu des plaisirs. Après la mort de ce prince, il s’embarqua pour Athènes sur une galère à cinquante rames que lui avait envoyée Hipparque ; ce fut là qu’il connut Simonide de Céos, autre grand lyrique ionien qui devait lui survivre et lui consacrer une double épitaphe. Ils bercèrent ensemble ce peuple enthousiaste et léger, mais ami du repos avant tout et redoutant les orages de la démocratie. Anacréon, quand Hipparque fut tombé sous le poignard d’Harmodius et d’Aristogilon, quitta Athènes et retourna à Téos : au bout de quelques années, une révolution vint l’obliger à échanger pour la seconde fois ce séjour contre celui d’Abdère, où il mourut suivant les uns ; mais, s’il faut en croire les vers de Simonide, ce fut à Téos, où il était retourné de nouveau, qu’il expira, à l’âge de quatre-vingt-cinq ans, étranglé par un pépin de raisin.

Les anciens possédaient de lui cinq livres de poésies, en pur dialecte ionien, non moins variées par le fond que par la forme, des hymnes, des élégies, des ïambes, outre ses chansons. À ce dernier genre appartiennent les cinquante-cinq petites pièces connues sous le nom d’Odes d’Anacréon, publiées pour la première fois en 1554, à Pans, par les soins d’Henry Estienne, d’après deux manuscrits qu’il n’indique pas. De là d’abord quelques soupçons, qui se sont évanouis quand ces poésies ont été retrouvées, avec un meilleur texte et une disposition différente, à la suite de l’Anthologie de Constantin Céphalas, dans un manuscrit de la bibliothèque Palatine à Heidelberg, transporté à la Vaticane de Rome, et publié dans cette dernière ville en 1781.

L’édition la plus généralement estimée de ce qu’on est convenu d’appeler les œuvres d’Anacréon est celle de Brunck. Ses odes ont été traduites en vers français par Longepierre, de la Fosse, Gacon, de Saint-Victor, Veissier-Descombes, Henri Vesseron et Girodet ; et en prose par Mme Dacier, Gail et par M. Ambroise-Firmin Didot, qui a joint à sa traduction le texte grec et cinquante-quatre photographies d’après les dessins de Girodet. Anacréon a trouvé d’heureux imitateurs parmi les Latins, et en tête il faut inscrire Horace, Catulle, Tibulle, Properce, Gallus, etc. Parmi nous La Mothe, Dorât, Chaulieu, Voltaire, Parny, l’ont librement imité dans quelques pièces. On a comparé aussi Panard, Collé, Désaugiers et Déranger à Anacréon ; mais toutes les pièces du genre anacréontique n’ont pas la simplicité, la grâce et le lyrisme de leur modèle.